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Avec le projet du gouvernement, les familles pourront plus facilement adopter les enfants abandonnés.
Pas assez d’enfants d’un côté, trop de familles candidates de l’autre : la réforme de l’adoption, dont un volet est présenté en Conseil des ministres ce matin, est attendue de pied ferme. «En France, traditionnellement, on favorise le lien biologique. On y reste très attaché. Pourtant, dans certains cas, quand le désintérêt des parents vis-à-vis de l’enfant est durable, il faut agir», explique Nadine Morano, secrétaire d’Etat chargée de la Famille à Libération.
Outils. En 2006 (derniers chiffres dont on dispose), seules 219 demandes judiciaires d’abandon étaient prononcées sur 23 000 enfants placés en familles d’accueil, (soit moins de 1 % d’enfants adoptables). C’est trop peu… et trop tard, selon le gouvernement. En moyenne, ces enfants «oubliés» ont attendu six années. «Le temps administratif n’est pas le temps d’un enfant. Un enfant grandit vite. Or, il a droit à un avenir, nous explique encore Nadine Morano, il fallait absolument intervenir, dans l’intérêt de l’enfant.»
Pour cela, le gouvernement entend modifier les conditions d’examen du «délaissement parental». Une mission confiée à l’Inspection générale des affaires sociales permettra d’en définir les critères et d’en établir les outils d’évaluation. Le parquet sera habilité à saisir le tribunal d’une demande de déclaration d’abandon. Et, chaque année, les travailleurs sociaux devront évaluer la situation des enfants placés qu’ils suivent.
Cette réforme reprend une préconisation du rapport commandé à Jean-Marie Colombani, ancien patron du Monde, pour qui «le primat de la famille biologique» relève d’une «posture» culturelle. En France, explique-t-il, l’enfant n’est pas vraiment vu comme un individu mais comme un membre du groupe familial. De plus, pour les travailleurs sociaux, marqués par la «volonté de se démarquer de l’histoire de l’aide sociale à l’enfance, longtemps et encore perçue comme l’institution qui place les enfants et les sépare douloureusement de leurs parents», l’adoption est souvent «un échec».«Il n’y aura pas d’objectifs chiffrés» tient à «rassurer» Nadine Morano.
Sésame. Le texte présenté aujourd’hui prévoit également de réviser l’agrément, ce sésame indispensable à toute adoption (nationale ou internationale) délivré par les conseils généraux. A l’heure actuelle, près de 30 000 familles bénéficient d’un agrément. «Il faut plus de visibilité : le département du Nord a fait le tri et a pu diviser d’un tiers le nombre des candidats. Les couples se séparent, renoncent à un enfant ou parviennent à en avoir…» constate Nadine Morano. Dorénavant il faudra confirmer chaque année sa volonté de devenir parent, sinon l’agrément tombera. Et les espoirs d’adopter avec.
Véronique Davienne, déléguée d’ATD Quart Monde, pointe le risque encouru par les parents biologiques :
Même si Nadine Morano, secrétaire d’Etat chargée de la Famille, veut les «rassurer», en indiquant que «seul l’intérêt de l’enfant sera pris en compte», et qu’il «n’est pas question de pauvreté», ATD Quart Monde estime que les familles les plus pauvres pourraient pâtir de la réforme de l’adoption. Véronique Davienne, déléguée nationale adjointe, l’explique.
Il faut faire très attention aux enfants qui ont des parents et sont placés, notamment quand on veut constater «le délaissement parental».
Les enfants placés bénéficient de soutien… mais pas les parents, ou pas assez. Les parents en grande pauvreté n’ont pas forcément les moyens financiers pour se rendre sur le lieu du placement. Ils ont un manque de confiance et se sentent disqualifiés comme parents. Quand il y a des fratries, les frères et sœurs ne vivent pas au même endroit, donc il n’y a plus de vie familiale. Les placements durent, les parents se découragent, sentent qu’ils n’ont plus leur place. On peut alors conclure trop vite au délaissement alors que cela ne correspond pas à la décision des parents. Cela ne veut pas dire que les enfants doivent absolument rester avec leurs parents vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Ils peuvent être élevés par d’autres. Mais là les moyens sont insuffisants pour accompagner les parents.
Oui, du coup l’adoption devient la solution ultime, alors que la rupture familiale aurait pu être évitée. Il pourrait y avoir des aménagements avant, davantage de travail en milieu ouvert pour éviter une adoption qui fait table rase des histoires antérieures.
Ce n’est pas mettre en avant les liens biologiques que de dire que l’intérêt de l’enfant ne réside pas dans la rupture totale et la négation de son histoire.
Nous reprenons la proposition de Jean-Marie Colombani d’une «conférence de consensus». Nous voulons participer à un large débat, serein, et non voir légiférer en urgence en fonction des lobbys respectifs.
Par ROTMAN CHARLOTTE
L’adoption (1) tient en quelques chiffres. En France, près de 30 000 familles ont un agrément. Les adoptions nationales, en baisse, représentent 20 % du total. En 2006, 764 pupilles de l’Etat sur 2 366 ont été placés en vue d’adoption, et 219 demandes judiciaires d’adoption ont été prononcées pour 23 000 enfants placés en famille d’accueil. Par ailleurs, en 2008, 3 266 enfants étrangers ont été confiés à des couples français (4 136 en 2005). La réforme prévoit un remaniement des missions de l’Agence française de l’adoption, qui pourra désormais mener des projets humanitaires dans les pays d’origine. Une stratégie d’implantation très efficace, utilisée depuis des années par les Etats-Unis ou l’Espagne.
Un site d’information s’ouvre aujourd’hui : Adoption.gouv.fr
Commentaires (2)
1. arnaud 21/07/2010
site magnifique engagé, je suis un amoureux des tornades et suis snsible a la cause de l'adoption.
2. séverine 11/06/2009
BRAVO maman!!!
l'adoption est une chose magnifique et tous les gens qui hésitent encore devraient se lancer... surtout après avoir lu ton site!!!